Mercredi 26 Janvier, le groupe français RMN en charge du Grand Palais annonçait une nouvelle retentissante pour le monde de l’art: la foire d’art contemporain Art Basel remplacera dorénavant la FIAC, fondée et tenue au Grand Palais depuis 1974.

Jean Christophe Castellin, directeur du Journal des Arts nous apprend que le groupe RMN avait lancé un appel d’offre pour organiser une foire d’art contemporain sur les créneaux de la FIAC. Selon lui, cette décision avait été prise du fait qu’il n’y avait pas de contrat entre le RMN et la FIAC et qu’il était donc nécessaire d’en établir un pour les évènements à venir. Art Basel, le grand concurrent des foires d’art contemporain, a répondu à cet appel d’offre et l’a finalement remporté. Ainsi, le groupe MCH, propriétaire de Art Basel, va reprendre le créneau de la FIAC, tenue par le groupe RX France, au Grand Palais à Paris pour accueillir un nouveau salon d’art contemporain en octobre. La société suisse MCH paiera désormais 10,6 millions d’euros pour un contrat de sept ans (hors frais techniques), qui durera jusqu’en 2028. 

Le directeur du Journal des Arts invoque aussi une autre raison qui a poussé le groupe RMN-Grand Palais à favoriser Art Basel au détriment de la FIAC. Selon lui, aujourd’hui, l’art contemporain est plus “tendance” qu’il ne l’a jamais été. Ainsi, beaucoup de secteurs créatifs s’en emparent: le luxe, la mode, les jeux vidéo ou la musique, de sorte que les organisateurs de foire d’art contemporain ont voulu créer des passerelles avec ces milieux créatifs pour rendre les foires d’autant plus attractives et lucratives, évidemment. C’est justement ce projet que l’organisateur d’Art Basel a proposé à la RMN; organiser un événement qui va aller au-delà du “set-up” traditionnel des foires d’art contemporain et créer des passerelles avec ces milieux créatifs. C’est ainsi que RMN réfère MCH et sa foire Art Basel comme « un leader mondial dans le domaine » capable de produire une foire adaptée à « un marché de plus en plus concurrentiel. » Selon Jean-Christope Castellin, c’est la raison principale qui a motivé cette décision, et elle correspond à une évolution très importante et significative de la société. 

C’est donc la fin de la foire d’art contemporain made in France, au profit d’une foire internationale. Qu’en-est-il alors des galeries françaises? Comment vont-elles être affectées? La déclaration de la RMN indique : “RX France et MCH se sont engagés à promouvoir une forte présence des galeries françaises à leurs salons respectifs, et à maintenir une politique de prix contrôlée. La RMN-Grand Palais et le ministère de la Culture superviseront étroitement le respect de ces engagements”. Jean Christophe Castellin quant à lui, affirme que les grandes galeries françaises sont ravies car cela permettra d’attirer de nouveaux collectionneurs. En effet, Basel ramène tous ses collectionneurs internationaux qui font de l’itinérance entre Bâle, Miami et Hong-Kong. Les plus petites galeries françaises, cependant, sont plus inquiètes car certaines seront expulsées de l’évènement pour laisser de la place aux nouvelles galeries internationales. 

Pourtant, Marc Spiegler, le directeur mondial d’Art Basel, a annoncé à The Art Newspaper que la nouvelle foire “ne sera certainement pas Art Basel Paris” et que MCH avait approché RMN pour prendre les dates d’octobre l’automne dernier, “mais nous ne nous attendions pas à la chance de venir si tôt”. Le créneaux d’octobre de la  Fiac était « le seul qui fonctionnerait pour nous, comme nous avons déjà la foire d’Art Basel à Hong Kong au printemps, Bâle en été et Miami Beach en hiver ». Plus tard dans la journée, le groupe RX France, organisateur de la Fiac, a publié un communiqué de presse notifiant que, s’il est heureux que Paris Photo se poursuive au Grand Palais, il “regrette vivement” la décision prise “brusquement” par RMN d’expulser la Fiac en faveur de l’offre de MCH, “à la fin d’une procédure qui, selon RX, était hâtive et imparfaite.” Michel Filzi, directeur général de RX France, déclare également dans le communiqué : “La procédure lancée par la RMN-Grand Palais n’est pas seulement une nouvelle qui impacte l’ensemble de l’écosystème associé à l’art contemporain français, mais elle interroge également la programmation des événements au Grand Palais. Si les événements les plus établis sont ainsi à la merci de décisions aussi brutales et unilatérales qu’imprévisibles de la part des responsables des bâtiments susceptibles de les accueillir en France, il est clair que c’est tout notre secteur qui sera touché, au grand bénéfice de nos concurrents européens. Nous nous réservons le droit de contester la décision concernant Fiac devant les tribunaux en faveur de son concurrent”. Cette décision pourra donc peut-être mener tous ces acteurs majeurs du monde de l’art au tribunal.

Affaire à suivre… 

Apolline Amaudric

Photo de couverture: Photo de la FIAC au Grand Palais, 2018, via: <https://blog.artsper.com/en/get-inspired/what-you-need-to-know-about-fiac-2019-2/&gt;