Pour clôturer 2020 en beauté, quoi de mieux que de mystérieuses statues soi-disant extraterrestres qui apparaissent et disparaissent partout dans le monde ? En effet, mi-novembre, des fonctionnaires ayant pour intention de recenser les mouflons du désert de l’Utah aux États-Unis survolent ce dernier en hélicoptère. À leur grande surprise, ils y trouvent tout autre chose : niché au cœur de la roche apparaît un prisme triangulaire mesurant un peu plus de trois mètres de hauteur, appelé monolithe, un mot qui vient du grec et qui signifie “une seule pierre” ou “bloc de pierre”.
Des images de Google Earth prouvent que la sculpture avait en fait été placée entre 2015 et 2016, c’est donc un hasard qu’elle n’ait été découverte qu’en novembre dernier. Depuis la révélation de sa découverte, d’autres monolithes sont apparus un peu partout sur le globe comme en Roumanie, en Californie, aux Pays-Bas, et au Royaume-Uni. Entre les diverses théories paranormales et les différents artistes qui se revendiquent auteurs de ces étranges sculptures, leurs origines restent plutôt obscures. Mais essayons d’éclaircir tout ça :
Quelques jours après sa découverte dans l’Utah, le 28 novembre, les centaines de touristes venus admirer la mystérieuse installation découvrent avec stupéfaction qu’elle a disparu. En effet, un photographe venu photographier le monolithe au clair de lune affirme que quatre hommes ont dérobé la sculpture dans la nuit du 27 novembre. Sur Instagram, ce dernier explique qu’ils auraient emporté le monolithe sur une brouette avant de lancer une célèbre phrase: “Leave no trace”.
Cette devise est connue des rangers et des visiteurs de parcs naturels américains et invite les touristes à laisser le site qu’ils visitent tel qu’il l’était quand ils l’ont trouvé. Cette intervention est donc sûrement liée au fait que, bien que les autorités aient pris soin de ne pas révéler le lieu exact de l’emplacement du monolithe, beaucoup d’internautes ont localisé la zone et une foule s’est ruée vers la sculpture le jour même de la divulgation de son existence, laissant derrière eux quantité de déchets et abimant considérablement cet environnement fragile.
Peu après le témoignage du photographe Ross Bernards, une vidéo intitulée “We removed the Utah monolith” est publiée sur Youtube par Andy Lewis, un funambule et sportif de l’extrême, suivi du simple message « Dans la nuit du 27 novembre 2020, vers 20h30, notre équipe a enlevé le monolithe de l’Utah. Nous ne dévoilerons pas d’autres informations pour le moment. ». Le mystère semble donc résolu en ce qui concerne l’enlèvement. Nous verrons plus tard qu’il en est pour l’origine de la sculpture.
La veille de l’enlèvement, à l’autre bout du globe dans la petite ville de Piatra Neamt au nord de la Roumanie apparaît un deuxième monolithe… avant de disparaître à son tour peu après, le 30 novembre.
Celui-ci était assez similaire à son double américain mais au lieu d’être poli, il portait des gravures. Son emplacement n’était pas choisi par hasard : il a été placé sur le site de l’ancienne forteresse de Petrodava, construite entre 82 av J.C et 106 ap J.C par une ancienne tribu du Bas-Danube, rapporte le Daily Mail. L’origine de son apparition et de sa disparition est inconnue à ce jour.
Le 2 décembre, c’est en Californie qu’un troisième monolithe apparaît au sommet de la montagne Pine à Atascadero. Celui-ci est quasiment identique à celui découvert dans l’Utah, à l’exception qu’il est moins robuste et menace de tomber à la moindre rafale de vent sur les visiteurs qui y accourent en masse chaque jour.
Le 6 décembre, c’est aux Pays-Bas, dans la province néerlandaise de Frise, au cœur d’un parc naturel, que des randonneurs tombent nez à nez avec un quatrième monolithe. Très vite là-bas aussi, des théories concernant leur origine fleurissent. En effet, des journaux locaux affirment qu’aucunes traces de pas n’ont été retrouvées autour de l’étrange sculpture et Thijs de Jong témoigne à la radio néerlandaise Omrop Fryslan que c’était comme si le monolithe avait été “placé d’en-haut.”
Enfin, au même moment apparaît un dernier monolithe sur l’île britannique de Wight. C’est une habitante de l’île, Alexia Fishwick qui découvre la sculpture, ébahie, avant de poster des photos sur les réseaux sociaux.
Dans une interview à la BBC elle affirme avoir déjà entendu parler des autres monolithes et qu’elle en connaissait donc la signification et que certaines personnes ont même pensé qu’elle avait photoshoppé ses photos ! Mais la sculpture est bien réelle, et les autorités ont décidé de ne pas l’enlever car “elle paraît bien fixée sur un bloc de bois” comme l’a déclaré un représentant de la National Trust. Les autorités ont annoncé que la plage allait cependant être surveillée pour éviter qu’elle ne devienne surpeuplée.
Alors, effet de mode ? Aliens ? Œuvres d’art ? Mystère non élucidé mais nous avons quelques pistes.
Les adeptes du cinéma auront reconnu la ressemblance avec les monolithes du film “2001 l’Odyssée de l’Espace” sorti il y a déjà près de 50 ans. Pour beaucoup, ces sculptures ne seraient donc qu’un clin d’œil au fameux film de Stanley Kubrick affirme le site Business Insider.
D’autres encore voient une ressemblance avec les œuvres de l’artiste américain John McCracken, décédé en 2011, une hypothèse qui s’appuie notamment sur une des déclarations du fils de ce dernier dans le New York Times: “ »Il était inspiré par l’idée de visiteurs aliens laissant des objets qui ressemblaient à son travail, ou auxquels son travail ressemblait. Cette découverte d’une pièce monolithique est tout à fait conforme à sa vision artistique ». Cependant, le marchand d’art spécialisé dans l’œuvre de McCracken, David Zwirner, a finalement annoncé qu’il pensait que le monolithe retrouvé en Utah n’était pas un original mais plutôt un hommage à l’artiste.
Peu après l’apparition du monolithe, un autre collectif d’artistes, “The Most Famous Artists”, a publié des photos d’un monolithe accompagnées d’un prix (45 000$), semblant ainsi revendiquer la paternité de ce dernier. Cependant, le groupe est resté très vague et le fondateur du groupe a déclaré sur Twitter « Je ne peux pas dire grand-chose en raison de la légalité de l’installation originale. Je peux dire que nous sommes bien connus pour les coups de pub de ce genre et, en ce moment, nous proposons des objets d’art authentiques sur notre site monoliths-as-a-service. » promettant plus d’informations dans les semaines à venir.
Enfin, selon Newsweek, le monolithe de l’Utah a aussi été attribué à l’artiste Petecia Le Fawnhawk qui vivait dans l’Utah et avait l’habitude d’installer des sculptures dans le désert. Cependant, Le Fawnhawk a dit à Artnet que même si elle « a eu la pensée de planter des monuments secrets dans le désert, » elle « ne peut pas réclamer celui-ci. » L’artiste a également apporté plus de théories sur l’origine du monolithe, en déclarant : « Ma première pensée et espoir était qu’il était peut-être une pièce perdue depuis longtemps par Richard Serra ou Ellsworth Kelly, ou peut-être la pierre tombale d’Edward Abbey. » Artnet a également déclaré que certains ont spéculé que l’artiste Max Siedentopf, connu pour avoir placé un lecteur MP3 à énergie solaire jouant la chanson de Toto « Africa » en boucle quelque part dans le désert du Namib, pourrait être derrière le monolithe.
Pour l’instant, il n’y a aucun moyen de savoir avec certitude qui a installé le premier monolithe de l’Utah, et, à moins que le véritable artiste ne se présente, nous ne le saurons peut-être jamais.
Apolline Amaudric
Photo de couverture : WikiMedia