
Avec plus de 8 milliards d’abonnements en téléphonie mobile dans le monde, il y a aujourd’hui plus d’abonnements téléphoniques qu’il n’y a d’humains sur Terre.
En 2020, nos smartphones et nos tablettes sont si “high-tech” qu’il est difficile d’imaginer que les matières premières utilisées pour les fabriquer sont encore ramassées à la pelle, dans des conditions de travail inhumaines. Et si leur design élégant et sophistiqué dissimule aisément la terrible réalité de leur conception, l’extraction du Coltan (un minerai conducteur essentiel à leur fabrication) en République Democratique du Congo (RDC), est tout sauf élégante.
Le pays produit entre 70% et 80% des ressources de Coltan au monde. Malheureusement, sa richesse est paradoxalement une malédiction : les enjeux liés à l’extraction de ce minerai stratégique sont tels que les Droits de l’Homme passent au second plan.
Plongés dans les profondeurs de la terre sans aucun équipement de sécurité, les mineurs creusent durant de longues heures en présence de milices privées qui contrôlent leurs faits et gestes. Pour les veines les plus profondes et les plus inaccessibles, des enfants sont envoyés. Loin de l’école et de l’éducation dont ils ont pourtant tant besoin, nombreux d’entre eux ne ressortent jamais des décombres.
Le processus d’extraction lui-même est dangereux pour l’environnement car il requiert des produits chimiques qui contamine les cours d’eau, dégradant les conditions sanitaires de ceux qui la consomme.
Les Zones de conflits
Les provinces de Kivu et Ituri, qui abritent le précieux minerai, regroupent plusieurs groupes rebelles, qui se disputent le Coltan. Financés par le Rwanda et l’Ouganda, ils ont renversé le régime de Mobutu, qui fût remplacé par Joseph Kabila en 2001.
Même si depuis, la région n’est plus convoitée par les gouvernements étrangers, elle reste aux cœur des conflits locaux. C’est grâce à la vente du minerai que les milices peuvent financer leurs armes, leur permettant ainsi de garder le contrôle.
De plus, le gouvernement accepte bien volontiers de fermer les yeux sur la situation, profitant au passage de la manne financière ainsi générée. Gecamines, une entreprise nationale chargée de l’exploitation des minerais Congolais, en est le principal rouage. Loin de remplir les caisses d’État, ses revenus tombent bien trop souvent dans les poches des élites et ne vont pas à l’amélioration des conditions de vie des populations.
Ainsi, avec un gouvernement corrompu et peu apte à agir, la situation n’a fait que s’aggraver en RDC.
Y’a t-il une alternative?
Il est clair que l’exposition médiatique du Coltan remet en cause la moralité d’une technologie que nous considérons pourtant indispensable.
Mais au delà des tweets et des photos partagées sur Instagram qui appellent au changement, y’a t-il réellement une alternative au Coltan? Pas vraiment. Même si quelques rares options existent, pour la plupart des grandes compagnies, le Coltan est essentiel.
Ainsi, pour les utilisateurs cherchant à minimiser leur impact, la loi Dodd-Frank des États-Unis peut être utile. Passée en 2010, la section 1502 de cette loi est censée forcer les sociétés américaines cotées en bourse à vérifier la provenance de leurs matériaux. Même si rien n’interdit à ces sociétés de poursuivre leur approvisionnement dans la région, elles doivent désormais tout mettre en œuvre afin de s’assurer qu’elles ne financent pas les groupes armés.
Si Apple et Google comptent parmis les entreprises qui ont fait le plus de progrès en la matière, Sony, Samsung et Toshiba demeurent, quant à eux, loin derrière. Ainsi, orienter nos achats vers les compagnies les plus “responsables”, pourrait contribuer à limiter notre impact et à éviter l’aggravation du conflit dans la région.
Julia Antone