Belle rentrée littéraire, avec des auteurs très attendus qui reviennent chaque année : Angot, Nothomb etc. mais aussi des politiques. Beaucoup de politique avec une critique fondamentale du régime Macron par Guillaume Larrivé et une nouvelle vie pour le PS grâce à Glucksmann fils. Zoom sur trois livres qui ont fait du bruit cette rentrée.
« Le Lambeau », Philippe Lancon, Gallimard 2018
Prix Femina, peu d’interviews, un auteur pudique et quelques 400 pages de confidence. Le récit est celui des attentats contre Charlie Hebdo, ou plutôt celui de la longue guérison d’une des victimes, journaliste chez Libé et Charlie Hebdo, Philippe Lançon. 3 ans après les attentats, le récit est bouleversant. L’auteur y dépeint des souvenirs confus d’une scène tenant du cauchemar et une longue rémission dans plusieurs hôpitaux parisiens. La trentaine de chirurgies, la relation avec son médecin, celle avec les soignants, ses gardes du corps et ses proches, tout y est décrit dans des détails oscillants entre une réalité invivable et des délires sous morphine. Longue thérapie de l’auteur, celle du lecteur se fait à travers les mots, si représentatifs, si bien choisis. Le style est absolument remarquable. La plume est très sophistiquée, et à la fois efficace et simple dans le sens qu’elle donne aux mots. « Je ne sens rien et je souffre déjà de tout ». La phrase est claire et déjà tellement imagée et poignante. Le livre apparait comme essentiel tant pour la mémoire des attentats que pour les survivants pour qui la vie n’est plus un privilège.
A lire, à offrir pour les fêtes, à relire encore.
« Avec toutes mes sympathies », Olivia de Lamberterie, Stock 2018
Rédactrice littéraire du magazine « ELLE », Olivia de Lamberterie sort son premier livre pour la rentrée littéraire 2018, « avec toutes mes sympathies ». Un sujet pas facile : le suicide de son frère qui bouleverse sa vie de manière brute et celle de ses proches. Le livre a un mérite tout à fait clair et transparent tout du long du récit, il démêle des tabous et surtout évacue une gêne quasi toujours présente lors d’un suicide. L’auteur y dépeint un deuil douloureux tant l’incompréhension est forte, et surtout un deuil profondément personnel qui ne laisse que peu de place au lecteur, ayant du mal à s’y représenter. L’écriture est concise, efficace, et plutôt directe. Le tout semble être écrit d’un jet, dans une évidence quasi absolue. Le lecteur comprend très vite qu’il s’agit là d’une écriture thérapeutique pour l’auteur, ce qui rend la lecture parfois trop intime, presque intrusive.
Le livre a été très –trop- médiatisé pendant cette rentrée littéraire, ce qui n’a rien d’étonnant considérant la notoriété de son auteur. La belle prestation chez Ruquier (ONPC) est convaincante, il faut néanmoins s’arrêter à celle-ci si on veut commencer la lecture : l’auteur dévoile la totalité de son livre au fil des interviews.
A lire en quelques heures à la montagne à la place de l’après-ski, rien de capital mais joli et touchant.
« Un tournant de vie », Christine Angot, Flammarion 2018
Il s’agit d’une grande histoire d’amour, constituée elle-même de deux amours, grâce au triangle amoureux Alex-Vincent-une femme. Cette femme dont on ignore le nom révulse par sa cruauté, envers un de ses deux hommes, mais provoque aussi la compassion du lecteur, personne n’étant parfait, dans sa condition tout à fait humaine. Le récit est culcul, parfois presque ridicule. Les dialogues sont plats, peu réalistes et évoquent si peu, voir rien du tout. On ne connait que mal les trois personnages, qui apparaissent seulement de manière plutôt superficielle, le livre étant court. L’auteur, chroniqueuse depuis plus d’une saison chez Ruquier le samedi soir, insiste toujours beaucoup sur l’importance des mots, la couleur que chacun d’eux évoque, le passé qu’ils dégagent, dans chacune des émissions. Pourtant, le style est ici profondément stérile et n’apporte rien au récit, qui lui-même n’apporte rien au lecteur.
Ne quittez pas l’après-ski pour le lire, laissez les pages entretenir la cheminée.
par Solal del Castillo
Crédits photo:
(1): Illustration de Julia Lamoureux pour Télérama
(2): https://aip.ci
(3): https://www.babelio.com
(4): http://www.audetourdunlivre.com