L’Union Européenne : d’une crise économique à une restructuration possible?

Par Aurelia Le Frapper

La crise financière et économique à laquelle l’union européenne est aujourd’hui confrontée est le résultat d’une succession d’anémies économiques. Si la crise des dettes souveraines est souvent mentionnée comme le catalyseur de la crise européenne, il ne faudrait pas négliger l’élément déclencheur de ce marasme économique : la crise des subprimes. En 2007 la crise du crédit immobilier, communément appelée « les subprimes », n’est qu’un élément précurseur de la faillite de la banque Lehman Brothers le 15 septembre 2008. Les marchés s’affolent, la crise financière américaine se propage à l’ensemble du globe et les pays européens entrent en récession.

En effet, la crise des subprimes engendre une perte d’argent des banques qui réduisent instantanément le nombre de crédits accordés à leurs clients par peur qu’ils leur fassent défaut. Dans l’objectif d’atténuer les effets de la crise et de sauver les banques, les états européens mettent en place des politiques économiques de relance (la finalité est de relancer la croissance en diminuant les impôts ou en augmentant les dépenses étatiques, notamment en incitant l’investissement) aggravant les dettes et déficits publics : débute alors la crise des dettes souveraines, une conséquence de l’endettement excessif des états Européens. En 2009, la Grèce révèle la situation catastrophique de ses finances publiques : au lieu des 3,7 % de déficit annoncés, il s’agissait en fait de 12,7% du PIB et la dette publique à hauteur de 113,4% : les faiblesses de l’économie grecque éclatent au grand jour. Face à la dissimulation de leurs chiffres, la note de la dette grecque est dégradée par les agences de notation : inquiets, les investisseurs, augmentent les taux auxquels la Grèce peut emprunter de l’argent. Face à cette situation, l’union européenne et le FMI décident, en échange d’un plan de rigueur radical, de lui prêter jusqu’à 110 milliards d’euros en trois ans.

Néanmoins rien n’y fait, et une effroyable mécanique se met en place. Les finances publiques des autres états européens se dégradent : Les PIIGS (Portugal, Italie, Irlande Grèce, Espagne) inquiètent de plus en plus les marchés financiers. L’UE annonce un plan d’aide de 750 milliards d’euros en partenariat avec le FMI en contrepartie de la mise en place de politiques de rigueurs de l’ensemble des États concernés.

L’exécution par les pays européens de strictes politiques d’austérité (la finalité étant la réduction de la dette publique par la hausse d’impôt et/ou la baisse des dépenses publiques) finit par toucher l’économie réelle de manière désastreuse. Un cercle vicieux se met en place. Face à cette situation, les ménages réduisent leur consommation, les entreprises gèlent les salaires et procèdent à des licenciements : la récession s’aggrave, le chômage augmente.

Source: Eurostat

Ainsi, la crise de la dette souveraine dans la zone d’euro a fragilisé l’union de l’ensemble des États Européens. La récession a frappé l’économie européenne, la croissance s’est contractée, les investisseurs se sont faits remarqués par leur absentéisme et le chômage a augmenté. En outre la crise ayant aussi et surtout touché les marchés bancaires, les banques ont été fragilisé conduisant à une diminution importante de prêts interbancaires (entre les banques) et par corrélation à une réduction de prêts bancaires aux ménages et entreprises.

La crise économique qui touche l’Europe n’est que l’illustration de l’existence d’une « Europe à deux vitesses ». Les crises successives ont fait apparaitre une hétérogénéité croissante des économies de la zone euro et ont révélé une vraie difficulté de convergence des politiques économiques, traduisant la faiblesse de la gouvernance économique européenne.

L’hétérogénéité des situations économiques au sein des États Européens, plus particulièrement au sein de la zone euro a été l’un des catalyseurs de la crise européenne. La divergence économique croissante au sein des Vingt-sept est non seulement révélée par les différences de compétitivité entre les pays mais aussi par la non-coordination des politiques économiques. En effet, les politiques budgétaires des états restent très nationalistes et non coopératives : beaucoup ont recours au dumping social (modification du droit du travail pour inciter l’implantation d’entreprises) et fiscal (accorder des avantages fiscaux aux entreprises, à l’instar du Luxembourg).

Ces crises successives ont aussi révélé l’absence d’un état fédéral, d’une Europe des nations : une difficulté à avoir un système de redistribution commun, où chacun se doit d’assurer son propre développement économique, d’établir son propre régime de protection social ou encore de bâtir un système éducatif parfait… Or certains États, notamment ceux d’Europe centrale, n’ont pas la possibilité d’investir dans ces domaines-là, affaiblissant ainsi d’autant plus la gouvernance économique de cette union.

De son côté la BCE instaure un premier programme de rachats des dettes publiques- le Security Market Program (SMP) – suivi, lors de l’arrivée de Mario Draghi à la tête de la BCE en 2011, de la mise en place d’un système similaire mais plus ambitieux : l’Outright Monetary Transactions (OMT). Il ne sera, au final, jamais vraiment utilisé. Progressivement, l’économie se redresse : en 2015 la croissance revient pour de bon au sein de la zone euro. En effet, cette dernière est parvenue à renforcer ses institutions, avec par exemple, la mise en place de l’union bancaire. Aujourd’hui, plus de doutes possibles : la zone euro est définitivement sortie de la crise. L’Eurozone devrait connaitre une croissance de 2,2 % en 2017 et l’UE, une hausse de son PIB à hauteur de 2,3% en 2017.

Néanmoins se pose à ce jour la question de savoir si l’Union Européenne sera capable de surmonter définitivement les crises politiques qui la traversent, tout en parvenant à bâtir une Europe unie et sociale. Est-elle finalement prédestinée à se transformer en État fédéral, en les « États-Unis d’Europe » ?

https://www.economie.gouv.fr/facileco/causes-crise-leuro

http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2017/08/09/20002-20170809ARTFIG00219-subprimes-dix-ans-apres-les-effets-de-la-crise-se-font-encore-sentir.php

https://www.touteleurope.eu/actualite/l-economie-europeenne-et-l-euro.html

http://www.lemonde.fr/economie/article/2017/11/09/la-croissance-atteindrait-2-3-dans-l-union-europeenne-en-2017_5212549_3234.html

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