Présidentielles américaines : De la violence des idées

Par Rita Bouziane

Changement [nom masculin] : modification profonde, rupture de rythme ; tout ce qui rompt les habitudes, bouleverse l’ordre établi. (Larousse, 2016).

« Make America great, again ! » Un week-end de février dernier, à l’université de Chicago à l’Illinois, des milliers de militants anti-trump ont interrompu un ralli politique de Donald Trump afin d’assumer haut et fort leur désolidarisation avec l’esprit Trump. Cependant, cela ne s’arrête pas là : non seulement le meeting a-t-il prit fin mais c’est la violence qui a pris le dessus, en provenance des deux camps. En effet, ce qu’il y a de commun aux deux partis qui ont pris part à ses affrontements est leur attachement à leurs idées et la violence avec laquelle ils défendent leurs positions idéologiques. Il semble fort de constater que depuis notre entrée dans le nouveau millenium, tout porte à croire qu’il sera « religieux, ou pas ! ». Selon le Southern Powerty Law, il y a plus de 14 % de groupes haineux qui existent aux États-Unis de plus par rapport à l’an passé, ce qui en fait un total de 892. En parallèle, nous vivons à une époque qui a été marqué depuis les dernières trois décennies par le combat pour les minorités des plus forts, divisant la société américaine entre deux parties, ne laissant qu’un petit espace au « juste milieu ». Il y a donc une corrélation positive entre une époque marquée par le changement et la rupture avec les normes d’une époque précédente et une violente confrontation de deux clans idéologiquement opposés.

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Les mouvements sociaux : moteurs du changement social 

Les mouvements sociaux sont l’ensemble des actions et des orientations collectives qui questionnent entièrement ou partiellement l’ordre social en place, dans l’optique de le transformer. Ils sont le moteur du changement social. Cette scission binaire de la société américaine est la parfaite illustration de l’analyse d’Émile Durkheim relative à la multiplication des conflits dans le sens où elle est le signe que les individus ne s’adaptent pas aux changements sociétaux. Cependant, de nos jours les frictions politiques vont au-delà de l’analyse qu’en avait fait l’Allemand Georg Simmel : celui-lui-lui, et en se basant à son étude du XXème siècle, les conflits sociaux jouent un rôle essentiel dans la promotion de la cohésion sociale car cela implique différentes formes de reconnaissance car ils impliquent une reconnaissance de l’altérité de l’autre. Je ne suis pas l’autre, et l’Autre ne suis pas moi, cependant nous pouvons vivre ensemble en compromettant sur un même terrain qui canalise la violence et la haine grâce à des règles bien précises : des sit-ings, des manifestations C’est la théorie de Lewis Coser qui veut qu’à travers les conflits sociaux, une identité commune peut surgir, donnant aux individus la possibilité de créer des liens sociaux et d’éviter la radicalisation du conflit. Ainsi, les différentes parties sont-elles poussées à communiquer, échanger et à trouver une issue au conflit, d’où une évolution de la société. D’un autre côté, il est fort de constater qu’il arrive – bien souvent – qu’une des deux parties ne soit pas prêt à accepter l’établissement de nouvelles normes sociales et donc l’arrivée d’une « révolution politique ». C’est ainsi que le conflit social américain s’est radicalisé, la violence se répand et les deux parties ne communiquent plus.

De la violence et de l’évolution

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L’affrontement au rally de Chicago de Donald Trump est la parfaite illustration de cela. Lorsque les démocrates américains et partisans de Donald Trump ont arrêté le meeting politique du candidat démocrate et ont déchiré des pancartes « Make America great, again ! », ce n’est pas qu’ils ne veulent pas que leur pays gagne des points de croissance, mais plutôt, ce vers quoi ils s’opposent complètement c’est que leur pays replonge dans le spectre de ce qu’étaient les États-Unis, une terre qui avant de devenir aux yeux de la communauté internationale le symbole de la liberté et l’immigration ; était le pays de la ségrégation et de la discrimination. Ainsi, les démocrates ne veulent pas risquer de perdre les valeurs pourslesquelles les défenseurs du mouvement des droits Civiques se sont battus. En effet, les partisans démocrates sont les héritiers des valeurs décrites par Alain Tourraine comme celles des nouveaux mouvements sociaux : des activistes qui se battent pour des revendications non-matrialistes qui vont au-delà de préocuationsmatérialistes, mais sont plutôt d’ordre culturel, sociales et politique. Nous parlons ici de l’héritage laissé par les Black Panther et la libération sexuelle née après les années 1968 et qui se sontrépandues à travers des États-Unis. Plus encore, la volonté de donner une voix aux désirs et aux problèmes des minorités.

Qui sont les républicains qui votent pour Donald Trump ?

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Si nous regardons de plus près les jeunes membres des Partis républicains et autres fanatiques de Donald Trump, il est fort de constater qu’ils s’opposent de manière assez ferme aux idées qui ne sont pas celles de leur parti, mais surtout, bien plus intéressant encore, il ne s’agit pas là de personnes qui sont nécessairement nées dans la première moitié du vingtième siècle : beaucoup sont jeunes et ont reçu une éducation qui va au-delà de leur dernière années de lycée. Alors qu’est-ce donc qui fait qu’ils se retrouvent dans les idées du personnage de Trump ? C’est l’effet de la crise économique qui a été le déclencheur du retour de revendications traditionnelles et matérialistes. Les fantômes du chômage et de retour pour hanter la conscience des Américains et il transporte avec lui ses amis précarité et pouvoir d’achat. Dès-lors, il est assez facile d’établir une corrélation positive entre les revendications de ces gens et leur attraction au slogan « Making America great, again ! » qui rend compte du fait qu’il voit dans un retour à tout prix à une croissance, la réponse à tout leur problème, que cela passe par la discrimination négative ou par la construction d’un mur.

Qui sont les démocrates qui votent pour Bernie Sanders ?

A se pancher sur une séquence vidéo ou un jeune Sanders est arrêté alors qu’il prend part à un mouvement d eprotestation en 1963 au sud de Chicago, c’est pus que son courage qui fait que les américains se tournent vers lui et respectent cela chez lui : son action en tant qu’un jeune homme de ving-et-un ans en tant qu’étudiant universitaire traduit parfaitement le fait que Bernie Sanders a depuis toujours été un homme en avance sur son temps, d’où l’attrait des jeunes américains, et du mond eentier, pour lui, il a grimpé très tôt dans le wagon « changement », s’opposant directement à ce que le système normatif et juridique disait.

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Évidemment, il s’en est sorti avec un ordre d’arête ce qui est une sanction négative mise en place par le pouvoir en place quand un individu n’obéit pas un officier de police. Mais qu’est-ce qu’un officier de police sinon le chien de garde du pouvoir politique légitime en place ?

In fine, il y a de très fortes altercations – parfois mêmes physiques – entre deux clans idéologiquement opposés ce qui soulève des questions relatives à la relation qui lie la démocratie au changement. Depuis que nous avons fait notre entrée dans le XXIème siècle, les pays du « Nord » – qui sont perçus comme les plus proches du principe de la démocratie – ont été le terrain de changements majeurs qui sont d’ailleurs célébrés et toujours défendus. À regarder de plus près les sélections de la 88ème cérémonie des oscars, elle s’est portée autour de films qui soulignent l’aspect non figé de nos sociétés allant de la transsexualité dans « The Danish Girl » au journalisme d’investigation, fervent défenseur de la vérité, dans « Spotlight ». Cependant, c’est dans ces mêmes pays qu’une autre partie de la société n’a pas vraiment grimpé dans le wagon du changement, ce qui va notamment se traduire politiquement par leur tournement vers des parties d’extrême droit. En Europe du nord-ouest par exemple, il a suffi d’une crise de réfugiés de guerre et d’une crise sociale pour que le berceau des droits de l’Homme et de l’amour de l’autre s’imbibe d’un parfum de fascisme.