‘La septième fonction du langage’, de Laurent Binet

Par J.B.

“La vie n’est pas un roman.” Ainsi démarre La septième fonction du langage, de Laurent Binet, publié aux éditions Grasset, et qui part d’une hypothèse simple: et si Roland Barthes avait été assassiné?

Nous sommes en 1980, en pleine effervescence post­-structuraliste et nous suivons les péripéties d’un duo improbable : Jacques Bayard, commissaire bougon (comme il se doit) et pas très futé qui enquête sur la mort de Barthes et Simon Herzog, jeune doctorant en

sémiologie à Vincennes. Ce dernier est réquisitionné par Bayard pour jouer l’interprète dans les milieux intellectuels, où le commissaire n’est évidemment pas très à l’aise (“Enculés d’intellos” dit Bayard). Au fil d’une intrigue complexe, qui mène le duo en Italie et aux Etats­Unis, se succèdent Foucault, BHL, Sollers, Kristeva, Deleuze, Butler, Althusser, Lacan, Lyotard, Debray, Searle, Cixous, Jakobson, Derrida, Eco… Ceux-­ci apparaissent dans des situations toutes plus saugrenues les unes que les autres (tel Foucault dans un sauna gay, pour vous donner une idée) au fur à mesure que l’enquête avance et se recentre justement sur cette mystérieuse “septième fonction du langage” ainsi que sur un société secrète de rhétorique…

Laurent Binet, auteur de HHhH, prix Goncourt du premier roman en 2010, s’est documente pendant cinq ans avant d’écrire le roman pour approfondir sa connaissance des penseurs et pour récolter des anecdotes sur lesquelles il a basé son travail. Le résultat pourrait être indigeste, et pourtant La Septième Fonction du Langage est tout à fait accessible malgré l’érudition: tous les penseurs sont abordés avec beaucoup d’humour. Par ailleurs, le fait de voir tous ces personnages mythiques du paysage intellectuel tournés en dérision est rafraîchissant.

Pour Barthes le “démythifieur”, la boucle est bouclée! Une introduction hilarante à la sémiologie et au post­-structuralisme en plus d’un policier palpitant.